La ferme du Hutin /

Le quartier du Hutin était autrefois situé en pleine campagne, et divisé en Bas-Hutin et Haut-Hutin. Il englobait les terres situées entre la Grande Vigne (ferme Salembier rue d’Oran) et le territoire de Wattrelos. Il était traversé par plusieurs sentiers, parmi lesquels le sentier du Mont-à-Leux qui passait près des fermes. Le Hutin était d’ailleurs le nom d’une cense et d’un hameau qui apparaissent dans les recensements de 1596 et de 1673. D’après l’historien Leuridan, la cense est occupée pendant deux siècles par la famille des de Lespaul, et elle prendra le nom de cense Delespaul. En 1850, un Constantin Delespaul, propriétaire, assiste au mariage du couple de cultivateurs Auguste Ferret et Elisa Houzet qui va exploiter la ferme.

En 1868 est établi le tracé de la future rue du Hutin, qui reprend en partie le sentier du Mont-à-Leux. On parle alors de la ferme Ferret. La ferme sera reprise par le couple Théodore Joseph Houzet et Amélie Joseph Lutun. Mariés à Roubaix le 31 juillet 1872, ce wasquehalien et cette tourquennoise d’origine vont exploiter la ferme désormais dénommée Houzet. En effet, leur fils et leur petit-fils leur succèderont. Ils deviennent également propriétaires de la ferme, qu’ils rachètent à une dame Watine. Cependant, le quartier se développe à partir de 1889. Le 24 mai 1889, les propriétaires riverains s’engagent à abandonner les terrains nécessaires et à participer aux frais de voirie. En 1890, c’est l’ouverture de la rue Delespaul, prélude à la réalisation du quartier, qui fait l’objet d’un projet d’urbanisme le 22 juin 1894. C’est le début de la fin des champs et pâtures de la ferme du Hutin.

Le petit-fils de Théodore, Henri Théodore Houzet-Bouckaert, reprend la ferme en 1924. Cette ferme a changé plusieurs fois de numéro (on cite les n° 6, 18, 44). Elle comportait une étable pour les vaches, une écurie pour deux chevaux, un pigeonnier, un poulailler avec poules, pintades et canards. On y stockait aussi les betteraves, le foin, les graines et futures semailles pour le potager. La cave était fraîche et bien garnie : conserves de pâté, jambon, lait, beurre, fromage, légumes, vins, tonneaux de bière, la température était idéale. Le fermier récupérait les drèches de la brasserie moderne, fraîches ensilées ou séchées pour la nourriture des bovins, ce qui donnait parfois au beurre un goût de bière. On y tuait le cochon, et on préparait le boudin, les pâtés de tête et de foie, des saucisses, on faisait fumer le jambon dans des tonneaux puis ils étaient cuits lentement dans un bouillon de légumes.

Quand Henri Théodore Houzet reprend la ferme, il n’y a que deux maisons et un café à proximité et des pâtures et des champs. Mais la ferme est peu à peu enserrée par les constructions. Bientôt, l’exploitation de la ferme ne suffit pas, le fermier envisage sa reconversion dans une entreprise de transport. Il achète un camion Chevrolet que conduira son fils. Puis, sur le coin de pâture qui lui reste, il construit des garages. Les terrains de la ferme avaient une superficie de près de 10 hectares.

Les enfants ne reprendront pas l’exploitation : le fils sera contremaître dans le textile et la fille partira en Afrique du Sud. Faute de pâtures, le fermier vend ses six vaches. Né dans la ferme comme son père et son grand-père, Henri Houzet cessera son activité en 1956. Si l’exploitation a cessé, le bâtiment existe toujours avec sa cour carrée typique des vieilles censes d’autrefois.

Remerciements à Agnès Deffrenne Houzet à qui nous devons la description de la ferme et de ses activités.

Le 26 juillet 2013, Philippe Waret.

La ferme du Hutin en 1868

La ferme au moment du projet de rue du Hutin, et à gauche du projet de canal.

Source : Archives municipales de Roubaix.

La structuration du quartier du Hutin en 1914

Source : Archives municipales de Roubaix.

La vue aérienne de la ferme en 1953

On voit encore des champs et vergers.

Source de la photographie : Institut National de l'Information Géographique et Forestière (IGN).

Les garages derrière la ferme, vue aérienne de 1964

Source de la photographie : Institut National de l'Information Géographique et Forestière (IGN).

La ferme du Hutin aujourd’hui

Source : Google Maps