Le XIXe siècle voit l’avènement d’une nouvelle catégorie de voyageurs, celle des écrivains qui voyagent d’abord pour eux-mêmes. On observe alors un renversement de perspective : la motivation du voyage prime sur le bilan de recherches dans un domaine particulier. Le voyage devient littéraire tandis que la destination à la mode est le voyage en Orient.
Dans la seconde moitié du XIXe siècle les descriptions de l’Afrique, de l’Océanie, et bientôt des régions polaires se multiplient. Publiés dans une presse à fort tirage (Journal des voyages et des aventures de terre et de mer, 1877-1929) et dans des collections à prix modique (La bibliothèque d’aventure et de voyages), ces récits deviennent alors une littérature populaire plus soucieuse de pittoresque et de stéréotypes que de qualité d’écriture et d’informations exactes.
Les écrivains romantiques décrivent des contrées qui ont le prestige des cultures millénaires et font partager dans leurs récits sentiments et dépaysements authentiques : on ne voyage plus pour découvrir et transmettre une information mais pour éprouver sur soi les émotions promises par un ailleurs désiré. Le but est d’en tirer une jouissance portée par l’écriture qui s’emploie à célébrer une nature choisie pour sa beauté idéale ou piquante, favorable à des élans de la sensibilité. Ainsi, pour Chateaubriand (1768-1848), l’exotisme apparaît comme une notion clé de l’expression romantique qu’il relate dans Itinéraire de Paris à Jérusalem en 1811.
Pourtant, le genre s’use et s’estompe devant la nouvelle forme de narration qu’est le reportage et l’apparition des nouveaux médias, capables de procurer l’enchantement exotique que les écrivains des siècles passés tiraient de leur seul art d’écrire.
La définition du voyageur témoin et historien de Chateaubriand est à la fois simple et claire « Enfin, j’aurai atteint le but que je me propose, si l’on sent d’un bout à l’autre de cet ouvrage une parfaite sincérité. Un voyageur est une espèce d’historien : son devoir est de raconter fidèlement ce qu’il a vu ou entendu dire ; il ne doit rien inventer, mais aussi il ne doit rien omettre ; et quelles que soient ses opinions particulières, elles ne doivent jamais l’aveugler au point de se taire ou de dénaturer la vérité ».